10.3.07

STATISTIQUES ETHNIQUES : LES RG AUSSI !



LE DJIHAD EN FRANCE

(Barbarians within our gates)

Le fait que l’on ne puisse pas, en France, connaître la diversité de la population parce que l’origine ethnique des délinquants est interdite, participe à la panne de notre système d’intégration.
Sarkozy , RTL, le 6 février 2006
Nous ne voulons plus vivre dans la peur. (”Laissez-nous grandir ici”, film pour Réseau Education Sans Frontières)
Rendre impossible à l’avenir d’utiliser les sans-papiers et l’immigration comme éléments de démagogie … (Richard Moyon, porte-parole de RESF)

Où l’on découvre que six mois avant la montée au créneau des chercheurs le mois dernier, c’était SOS Racisme qui avait lancé une première attaque contre les statistiques ethniques.

Petit retour donc, au lendemain de l’entretien de Nicolas Sarkozy sur TF1 avec son projet de “ministre de l’identité et de l’intégration” qui promet de faire couler beaucoup d’encre …

Et quelques jours après l’appel dans Le Monde de nos belles âmes du cinéma qui se la jouent “Vel d’Hiv’ 1942″ (avec quand même quelques métros de retard! - ça leur rappelle, parait-il, “les heures les plus noires de notre histoire”, eux qu’on a peu entendu il y a quelques jours sur la défense, elle aussi tardive, de Papon par notre Barre national) en faveur de la régularisation des sans-papiers …

Ainsi qu’un peu plus d’un an après le lynchage du jeune juif Ilan Halimi par une bande de jeunes barbares africains et maghrébins de Bagneux …

Sur une série d’études des RG, que rappelle aujourd’hui Ivan Rioufol dans sa chronique du Figaro, sur les bandes de jeunes de nos banlieues défavorisées, naturellement dûment enterrées mais que le Monde avait pour une fois sorties et pour lesquelles SOS Racisme s’était empressée de les poursuivre en justice.

Et que pouvaient révéler d’aussi grave ces études (”uniquement chiffrées et non nominatives”, s’empressent-ils de préciser) sur ce que Le Monde qualifie pudiquement de “thème abordé traditionnellement à reculons par les policiers” ?

Et bien qu’ils avaient trouvé parmi les meneurs, une “origine maghrébine à 67 %” et “africaine à 17 %”, pour seulement “9% de Français d’origine non immigrée”.

Ils évoquaient aussi l’ “acharnement”, la “sauvagerie” et la “barbarie”, y compris à l’occasion avec des “gourdins à clous” et sous l’influence de “colle ou d’acétone” sniffées “afin de se rendre insensibles à la douleur”.

SOS Racisme accuse les RG d’avoir constitué un fichage ethnique des délinquants
LEMONDE
le 23.08.06

SOS-Racisme a déposé mardi une plainte contre X avec constitution de partie civile. L’association accuse les Renseignements généraux d’avoir constitué un fichier de délinquants sur la base de leur origine ethnique.

Les policiers des renseignements généraux (RG) sont accusés d’avoir constitué un fichier de délinquants sur la base de leur origine ethnique dans une plainte déposée, mardi 22 août à Paris, par SOS Racisme. Il s’agit d’une plainte contre X avec constitution de partie civile, qui entraîne quasi automatiquement la désignation d’un juge d’instruction.

En cause, un rapport des renseignements généraux daté du 6 janvier 2005 répertoriant l’origine ethnique “de 436 meneurs recensés dans 24 quartiers sensibles”. Le Monde daté du 25 février 2006 avait révélé les conclusions de ce rapport : “Parmi [les meneurs], 87 % ont la nationalité française, 67 % sont d’origine maghrébine et 17 % d’origine africaine. Les Français d’origine non immigrée représentent 9 % des meneurs”, peut-on y lire.

SOS Racisme considère que pour arriver à cette conclusion, les policiers des RG ont nécessairement établi un fichier de délinquants sur une base raciale. “En tout état de cause, les statistiques des délinquants selon leur origine ethnique n’ont pu être révélées à la presse qu’après qu’un fichier a été mis en place au sein des renseignements généraux”, écrit Samuel Thomas, vice-président de l’association, dans la plainte transmise à la presse.

INFRACTION PÉNALE

SOS Racisme rappelle que ce fichage contrevient à l’article 226-19 du code pénal qui interdit la “mise ou conservation en mémoire informatisée, sans le consentement exprès de l’intéressé, des données à caractère personnel qui, directement ou indirectement, font apparaître [notamment] les origines raciales ou ethniques”. Le code pénal prévoit une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende pour ce délit.

Dans un communiqué, la direction générale de la police nationale (DGPN) assure mardi qu’”aucun fichier” contenant des données ethniques “n’a été créé par un service de police”. La direction explique que “les chiffres contenus dans le rapport […] sont le résultat d’une évaluation effectuée sur la base des renseignements d’état civil figurant obligatoirement dans les procès-verbaux d’audition”. Il s’agit d’une étude “uniquement chiffrée et non nominative” explique la DGPN, avant de rappeler que “toute constitution de fichier par un service de police est subrogée à l’autorisation et au contrôle de la Commission nationale informatique et liberté”.

SARKOZY VISÉ

Mais SOS Racisme va plus loin dans sa plainte, s’en prenant directement à Nicolas Sarkozy : “L’existence de ce rapport est étayée par les déclarations faites à la presse par le ministre de l’intérieur en faveur de l’apparition de l’origine ethnique des délinquants dans les statistiques officielles”, ajoute l’association. SOS Racisme fait référence à une déclaration de M. Sarkozy à RTL le 6 février 2006, où il déplorait l’impossibilité légale de mentionner l’origine ethnique des délinquants. “Le fait que l’on ne puisse pas, en France, connaître la diversité de la population parce que l’origine ethnique des délinquants est interdite, participe à la panne de notre système d’intégration”, avait alors déclaré le président de l’UMP.

Il est “nécessaire qu’un juge d’instruction soit désigné aux fins de récupérer les fichiers du ministère de l’intérieur répertoriant l’origine ethnique des délinquants, ainsi que le rapport établi par les services de ce ministère et d’identifier tant les commanditaires que les auteurs de ce rapport”, conclut l’association dans sa plainte.

Avec Reuters et AFP

Plusieurs rapports des renseignements généraux (RG), dont Le Monde a eu connaissance, se sont penchés sur la composition des bandes, leur usage de la violence, ainsi que sur un thème abordé traditionnellement à reculons par les policiers : l’origine ethnique de leurs membres

« acharnement », de « sauvagerie » et de « barbarie », citant l’utilisation épisodique d’armes destinées à infliger des blessures graves, comme des gourdins à clous, sans parler des armes à feu. Exemple relevé par les RG, celui de jeunes d’Etampes (Essonne) qui snifferaient des produits comme de la colle ou de l’acétone avant d’affronter des groupes rivaux, afin de se rendre insensibles à la douleur.

Les renseignements généraux ont établi un profil type des principaux délinquants dans ces groupes, à partir de l’étude de 436 meneurs, recensés dans 24 quartiers sensibles. Parmi eux, 87 % ont la nationalité française ; 67 % sont d’origine maghrébine et 17 % d’origine africaine. Les Français d’origine non immigrée représentent 9 % des meneurs, selon les RG.

les violences constatées à l’occasion de la manifestation lycéenne du 8 mars 2005 contre la loi Fillon ont incité les policiers à se pencher sur le racisme anti- « Blanc », « une réalité quotidienne », selon le titre d’une étude du 4 juillet 2005.

« Face à l’effritement des anciennes formes de solidarité (famille, communautés d’origine, syndicats, Eglises, associations…), le «caïdat» local, suivi de près par le radicalisme religieux, a investi les quartiers sensibles, apportant un semblant de repères identitaires à des jeunes désoeuvrés », soulignait la direction centrale des renseignements généraux (DCRG) en janvier 2005.

Si les bandes sont rarement homogènes d’un point de vue ethnique, les jeunes d’origine africaine ancrés dans la délinquance présenteraient tout de même des particularités, à en croire une note du 3 octobre des renseignements généraux de la préfecture de police (RGPP). L’une d’elles serait « l’extrême violence de leurs actes ».

Selon le rapport, « ces jeunes réagissent en effet, de façon démesurée, surtout lorsqu’ils sont en groupe, le dérapage pouvant intervenir à tout moment. Le fait de tuer est complètement banalisé par la télévision, qui filme la mort en direct (…). Donner la mort s’inscrit dans une sorte de parcours initiatique qui permet d’être reconnu et de s’élever dans la bande, d’autant que l’excuse de la provocation, sous une forme quelconque, vaut toujours absolution. »

LA MORT D’ILAN HALIMI
Bandes : la spirale de l’ultra-violence
Le Monde du 25.02.06

Quelques copains, des petits trafics, un territoire, un leader. Parfois, l’amitié de quartier débouche sur le grand banditisme. Policiers et experts décrivent un phénomène qui touche les cités

Ils ont grandi ensemble, dans les HLM de Bagneux (Hauts-de-Seine), plus attachés à leur cité qu’à leurs origines, diverses. Une puissante solidarité les lie, et l’appât du gain les motive. Pour les policiers de la brigade criminelle, les individus écroués pour avoir participé à la séquestration et à la mort d’Ilan Halimi formaient une bande de cité classique, jusqu’au déchaînement de violence contre la victime.

« Ces jeunes se sont connus à l’école ou au collège, ils sont fanas d’Internet et de téléphonie, discutent à longueur de journée, vivent en autarcie, montent des business ensemble, passent du vol à l’arraché le matin au vol à main armée le soir, diagnostique François Jaspart, directeur de la police judiciaire parisienne. Dans leur organisation, on trouve un chef, des cadres et des ouvriers. Ils veulent profiter de la société de consommation, qui n’est pas à leur portée, mais qu’ils voient fonctionner. »

Plusieurs rapports des renseignements généraux (RG), dont Le Monde a eu connaissance, se sont penchés sur la composition des bandes, leur usage de la violence, ainsi que sur un thème abordé traditionnellement à reculons par les policiers : l’origine ethnique de leurs membres. Ces groupes se structurent autour d’un noyau de cinq à quinze personnes, issues du même quartier.

Contrairement aux Etats-Unis, ils ne se regroupent pas en fonction de leur appartenance à un groupe ethnique spécifique, mais à un territoire - leur cité -, élément clé de leur identité. Il peut s’agir d’un simple regroupement de copains qui traînent ensemble au pied de leurs immeubles ou, au contraire, d’une organisation beaucoup plus structurée se livrant à des activités crapuleuses.

A Bagneux, le noyau dur, rompu aux actes délinquants, était animé par Youssouf Fofana. Puis se sont agrégés des jeunes et des adultes du quartier, plus ou moins impliqués, pas tous décidés à basculer dans la violence pure. La séquestration prolongée de la victime, sans issue financière positive, en a d’ailleurs conduit plusieurs à s’interroger sur l’intérêt de l’opération.

Les petits trafics constituent la source de revenus essentielle des bandes, mais ils peuvent aussi servir de sas vers des actes plus graves. L’effet d’entraînement et de mimétisme joue à plein. « Les liens sont de plus en plus étroits entre la violence urbaine et la délinquance acquisitive pouvant aller jusqu’au grand banditisme », notaient les RG dans un rapport, en janvier 2005. Ce passage très rapide de la petite délinquance de quartier à la grande criminalité entraîne parfois un manque de professionnalisme et de technique, comme l’a illustrée, selon la brigade criminelle, l’incapacité de Youssouf Fofana et de ses proches à obtenir le versement d’une rançon.

En 2005, les RG ont recensé 435 affrontements entre bandes (contre 225 en 2004 et 281 en 2003) ; ils ont fait 8 morts, contre 14 en 2004. L’Ile-de-France concentre la moitié des faits recensés. « Face à l’effritement des anciennes formes de solidarité (famille, communautés d’origine, syndicats, Eglises, associations…), le «caïdat» local, suivi de près par le radicalisme religieux, a investi les quartiers sensibles, apportant un semblant de repères identitaires à des jeunes désoeuvrés », soulignait la direction centrale des renseignements généraux (DCRG) en janvier 2005.

Une telle violence peut aussi se retourner contre les habitants de la cité. Le gang de Bagneux a exercé de telles pressions. Une jeune fille de 19 ans, prénommée Leila, a ainsi été mise en examen pour non-dénonciation de l’enlèvement d’Ilan Halimi. Son petit ami, Jérôme, s’était retiré de la bande de Youssouf Fofana le 30 janvier en raison de la tournure des événements.

Toutefois, le juge des libertés et de la détention a choisi de ne pas écrouer cette jeune fille en invoquant notamment le « climat de peur et de contrainte » qu’elle avait subi. « Cette bande est bien organisée, avec un certain degré de sophistication et une capacité à terroriser beaucoup de gens qu’on ne soupçonne pas », explique Me Jean Balan, avocat d’une autre jeune femme ayant servi d’appât.

Les renseignements généraux ont établi un profil type des principaux délinquants dans ces groupes, à partir de l’étude de 436 meneurs, recensés dans 24 quartiers sensibles. Parmi eux, 87 % ont la nationalité française ; 67 % sont d’origine maghrébine et 17 % d’origine africaine. Les Français d’origine non immigrée représentent 9 % des meneurs, selon les RG.

Si les auteurs des actes de délinquance sont de plus en plus jeunes, la moyenne d’âge des meneurs, en revanche, est assez élevée. Plus de la moitié ont entre 19 et 25 ans. Comme Youssouf Fofana, âgé de 25 ans. Près de 80 % d’entre eux ont été mis en cause pour divers délits de droit commun, en particulier l’usage et le trafic de stupéfiants.

Si les bandes sont rarement homogènes d’un point de vue ethnique, les jeunes d’origine africaine ancrés dans la délinquance présenteraient tout de même des particularités, à en croire une note du 3 octobre des renseignements généraux de la préfecture de police (RGPP). L’une d’elles serait « l’extrême violence de leurs actes ».

Selon le rapport, « ces jeunes réagissent en effet, de façon démesurée, surtout lorsqu’ils sont en groupe, le dérapage pouvant intervenir à tout moment. Le fait de tuer est complètement banalisé par la télévision, qui filme la mort en direct (…). Donner la mort s’inscrit dans une sorte de parcours initiatique qui permet d’être reconnu et de s’élever dans la bande, d’autant que l’excuse de la provocation, sous une forme quelconque, vaut toujours absolution. »

Dans le même rapport, quatre mois avant les faits, les policiers parlaient déjà d’« acharnement », de « sauvagerie » et de « barbarie », citant l’utilisation épisodique d’armes destinées à infliger des blessures graves, comme des gourdins à clous, sans parler des armes à feu. Exemple relevé par les RG, celui de jeunes d’Etampes (Essonne) qui snifferaient des produits comme de la colle ou de l’acétone avant d’affronter des groupes rivaux, afin de se rendre insensibles à la douleur.

« C’est vrai qu’on constate un passage à l’acte violent plus précoce et plus rapide, mais il ne faut pas présenter ces jeunes comme des sauvages, note le chercheur Thomas Sauvadet, spécialiste du phénomène des bandes. Ils vivent dans un environnement violent, sont violents entre eux et subissent des discriminations ressenties comme des violences. Tout cela s’articule pour créer un jeune en état de guerre psychologique. »

Les renseignements généraux n’ont pas conduit d’étude spécifique sur l’antisémitisme en banlieue. En revanche, les violences constatées à l’occasion de la manifestation lycéenne du 8 mars 2005 contre la loi Fillon ont incité les policiers à se pencher sur le racisme anti- « Blanc », « une réalité quotidienne », selon le titre d’une étude du 4 juillet 2005.

Les RG y citent des exemples de menaces et d’agressions, notamment contre les personnes qui travaillent pour les bailleurs sociaux ou les services publics.

Piotr Smolar

350 professionnels du cinéma lancent un appel en faveur des sans-papiers. Dans un court métrage diffusé en salles à partir de mercredi 7 mars, des enfants expriment leurs espoirs
Ces enfants veulent vivre en France
Le Monde du 07.03.07

Après avoir été au coeur de l’actualité cet été, lors de l’installation dans un gymnase de Cachan (Val-de-Marne) de familles évacuées d’un squat de cette ville de la banlieue sud de Paris, les sans-papiers ont repris le chemin de l’ombre et du silence. Une nouvelle initiative, organisée conjointement par un collectif de cinéastes et le Réseau Education sans frontières (RESF), vise à faire reparler d’eux : un film de trois minutes, écrit et interprété par des enfants de sans-papiers, doit être diffusé à partir du 7 mars en quatre cents copies dans toute la France.

Intitulé Laissez-les grandir ici !, il sera projeté dans toutes les salles du réseau art et essai, et diffusé sur Internet. S’il a du succès, comme l’espèrent ses promoteurs, des copies supplémentaires seront tirées dans les semaines suivantes. Le film est signé par trois cent cinquante professionnels du cinéma (réalisateurs, acteurs, techniciens…), qui sont également les premiers signataires d’une pétition en ligne, accessible sur le site www.educationsansfrontieres.org.

Née au lendemain de l’évacuation du squat de Cachan, chez des cinéastes qui avaient manifesté aux côtés des sans-papiers et parrainé des enfants, l’initiative rappelle l’appel à la désobéissance civile qu’avaient lancé soixante-six cinéastes en 1997, en réaction au projet de loi Debré qui, entre autres mesures, voulait obliger les personnes hébergeant des visiteurs étrangers à déclarer à la préfecture le départ de ces visiteurs. Cet appel était, lui aussi, accompagné d’un film. Comme le souligne le cinéaste Christophe Ruggia, à cinq semaines du premier tour de l’élection présidentielle, l’enjeu est clair : « Il faut remettre le problème des sans-papiers sur l’échiquier politique, et pour cela nous voulons être massivement présents sur tous les supports. Si nous ne le faisons pas maintenant, il ressurgira à l’identique, dans trois ou quatre ans, comme à chaque fois qu’est donné un grand coup de barre à droite. »

Le film est simple, beau et fort. Une douzaine d’enfants y disent, chacun à son tour, une phrase ou un morceau de phrase qui, mis bout à bout, forment une histoire. Cette histoire, c’est celle qu’ils ont en partage, qu’ils viennent de Chine, de Syrie, d’Inde, du Maghreb, d’Europe de l’Est ou d’Afrique de l’Ouest. Qu’ils vivent dans des appartements ou dans des hôtels. Que leurs parents aient fait de la prison, qu’ils aient été placés en centre de rétention, où qu’il ne leur soit rien arrivé de tel.

« ON A PEUR »

« Tous les jours on a peur, disent-ils dans le film. On a peur que nos parents soient arrêtés par la police quand ils vont au travail, quand ils prennent le métro. On a peur qu’on les mette en prison, que nos familles soient séparées et qu’ils nous renvoient dans des pays qu’on ne connaît pas. On y pense tout le temps. Est-ce que c’est normal d’avoir peur quand on va à l’école ? L’été dernier, nos parents et nous, on a eu l’espoir d’avoir enfin des papiers. (…) On s’est inscrits dans des bureaux. On a cru qu’on serait régularisés, que le cauchemar serait terminé. (…) Ceux qui ont eu leurs papiers avaient le même dossier que nous. Et pourtant on nous a dit : non. Arbitrairement. Maintenant on est en danger et on doit se cacher. Pourquoi cette injustice ? Nous ne voulons plus vivre dans la peur. Nous voulons que la France nous adopte. Nous voulons être régularisés. Laissez-nous grandir ici. »

Le texte est le résultat d’ateliers d’écriture au cours desquels des enfants, réunis par RESF, ont raconté chacun leur histoire. Les cinéastes leur ont ensuite soumis une synthèse de l’ensemble des récits, ont longuement débattu avec eux de chaque mot, et sont arrivés à une version dans laquelle les enfants se reconnaissent. Le film a ensuite été réalisé grâce à des dons de signataires, mais aussi de toutes sortes de prestataires, qui ont choisi de rester anonymes. Certains enfants, comme Maryam, Malienne de 16 ans installée en France depuis 2002, aujourd’hui déléguée de sa classe, ont participé aux ateliers d’écriture mais n’ont pas voulu être filmés, de peur d’être identifiés. Pour ceux qui ont accepté d’être filmés, la décision n’a pas toujours été évidente. Li, 13 ans, réticente au départ, a finalement accepté pour une raison qui lui paraît aujourd’hui évidente : « Quand on est plus nombreux, on a plus de force. »

Les profils et la nature de l’engagement des signataires sont eux aussi à géométrie variable. Richard Moyon, porte-parole de RESF, attend de cette action, idéalement, qu’elle rende « impossible à l’avenir d’utiliser les sans-papiers et l’immigration comme éléments de démagogie ». Le cinéaste Cédric Kahn, lui, l’inscrit « dans la droite ligne de l’appel à la désobéissance civile de 1997 », dont il était signataire. « La mobilisation avait alors été très forte, mais elle n’avait rien donné. »

Frappé par le discours des enfants du film sur la peur, qui lui rappelle « les heures les plus noires de notre histoire », il regrette que contrairement au mouvement de 1997, qui était très politisé, celui d’aujourd’hui ne le soit pas du tout. « Nos revendications ont considérablement diminué en dix ans. Aujourd’hui, il n’y a même pas de position commune sur la régularisation. A force que les hommes politiques de tout bord nous répètent que l’idée d’une France accueillante n’est pas possible, les gens ont cessé d’y croire. L’immigration est devenue un sujet tabou, même pour la gauche. C’est plus facile de sensibiliser sur les enfants. Parler des enfants, c’est soutenir une cause humanitaire. »

Isabelle Regnier

09 mars 2007 Publié Présidentielle 2007, France, idiots utiles/compagnons de route, désinformation | Lien permanent | Un commentaire »

texte repris du site jc durbant